Comprendre l'immobilier

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12 mai 2022
Le « flex office » pousse l’immobilier de bureaux à se réinventer
Avec le télétravail et les demandes des salariés, le « flex office » (sans bureau fixe) bouleverse les modèles de l’immobilier de bureaux, un changement lourd de conséquences pour le secteur, ne serait-ce que pour sa signification pour la demande placée.

Le marché de l’immobilier de bureaux a fait un bond de sept ans pendant les dix-huit mois de télétravail qui ont prévalu pendant la crise sanitaire : les entreprises veulent se rapprocher des centres-villes et des transports en commun, en réduisant les surfaces et en passant au « flex office » : l’IEIF, dès le premier déconfinement, imaginait qu’à raison de deux jours de télétravail par semaine, près d’un tiers des surfaces pourrait être libéré, soit 3,3 millions de m² pour la seule région parisienne. Les investisseurs, pendant ce temps, temporisent leurs acquisitions dans les nouvelles tours et les quartiers de gares du Grand Paris. 

Une reprise plus nette et rapide que prévue 

Mais il ne faut pas enterrer le bureau trop vite : après une année 2020 (logiquement) très basse, la reprise a été plus nette et rapide que prévue, avec une année 2021 record à la Défense et « 548 716 mètres carrés placés au 1er trimestre 2022, soit une hausse de 6 % par rapport à la moyenne d’un 1er trimestre depuis dix ans », affirme Knight Frank. CBRE table sur 2 millions de mètres carrés de transactions d’ici la fin de l’année, donc un retour à la moyenne décennale. Cependant, le télétravail a bon dos, puisque c’est surtout la guerre des talents du secteur de la tech qui a contribué à faire comprendre aux directeurs immobiliers qu’il fallait se rapprocher des centres-villes, d’autant que les entreprises doivent réduire drastiquement d’ici 2030 la consommation d’énergie de leurs bâtiments. 

Le mètre carré à Paris QCA se loue 940 euros par an, ainsi qu’autour de la gare Montparnasse : le mouvement ne fait que s’accélérer à mesure que les fins de bail approchent. Le coût de ce retour est lui-même une justification pour le « flex office », représentant « une économie de 11 000 euros par an, par collaborateur » table Christophe Burckart, directeur général de IWG France. En 2021, la taille des grandes opérations en Ile-de-France (supérieures à 5 000 m²) a été réduite de 25 % à 30 % par rapport à une moyenne sur dix ans, relève CBRE. Resserrer les surfaces n’est toutefois pas systématique : 40 % des réaménagements se font à périmètre constant, même si les espaces sont utilisés différemment, mettant fin au bureau individuel et faisant la part belle aux espaces collectifs et aux services associés… qui nécessitent aussi des économies.  

La banlieue souffre de la vacance 

La conséquence notable est que les vacances augmentent dans certains quartiers. A l’heure où des sociétés quittent Asnières ou Gennevilliers pour s’installer dans les tours à La Défense où les mesures d’accompagnement se font avantageuses, de l’ordre de deux ans de loyer offerts sur un bail de neuf ans, ce afin d’écouler les centaines de milliers de mètres carrés mis sur le marché, Rueil-Malmaison, Suresnes et les quartiers de Nanterre « hors Défense » voient leurs vacances augmenter. Si dans ces zones, les prix de l’immobilier permettent aux promoteurs de transformer les bureaux en logements ; en revanche, à Clichy, Saint-Ouen ou Saint-Denis, où la ligne 14 se prolonge, les plateaux attendent preneur : « Pour les immeubles neufs ou restructurés, le stock de locaux vacants serésorberaplus lentement, mais il n’y aura pas trop de problèmes. Le sujet, ce sont les actifs de seconde main», prévient David Bourla, responsable des études chez Knight Frank. « L’idéal serait d’en faire du résidentiel. A 2, 3 kilomètres de la Défense, on a des acheteurs, la demande est là, mais les mairies n’y sont pas favorables. Les bureaux rapportent quand le logement oblige à construire des crèches et des écoles », complète son directeur, Vincent Bollaert.  

Sur les 14 millions de m² annoncés d’ici 2030 sur le territoire du Grand Paris, les professionnels prévoient que les bureaux les plus éloignés des transports en commun ne verront pas le jour, puisque l’existant devra être d’abord absorbé avant de lancer de nouveaux programmes… mais le financement des ZAC sera plus difficile sans vente de bureaux, tandis que les emplois devront suivre l’implantation de logements en banlieue pour éviter un effet pervers sur les transports en commun… 

Source : Le Monde / Reproduction interdite 

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